Expulsion des squatteurs : lois, démarches et solutions rapides

La législation française sur les squats a été renforcée au fil des années pour permettre une gestion plus rapide et efficace de ces situations. Voici les points principaux à retenir :
Les bases légales
- Le squat est considéré comme une violation de domicile selon l’article 226-4 du Code pénal, passible de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende.
- La loi de 2023 a introduit l’infraction d’occupation frauduleuse, étendant la protection à tout local d’habitation (résidence principale, secondaire ou logement vacant).
- Les squatteurs ne bénéficient ni de la trêve hivernale ni des délais classiques d’expulsion.
Deux voies principales pour l’expulsion
- Procédure administrative rapide par le préfet :
- Réservée aux domiciles (au sens large), elle permet une évacuation forcée en quelques jours après une mise en demeure aux occupants.
- Nécessite de fournir un dépôt de plainte, un constat d’occupation illégale, et la preuve de propriété ou de résidence.
- Procédure judiciaire classique :
- S’applique si la procédure préfectorale n’est pas possible ou si les squatteurs contestent leur statut.
- Comprend une action devant le tribunal, un jugement d’expulsion et l’intervention d’un huissier.
- Peut être plus longue, mais reste incontournable pour les situations complexes.
- Procédure administrative rapide par le préfet :
Sanctions et responsabilités
- Les squatteurs encourent des peines lourdes, notamment pour violation de domicile ou occupation frauduleuse.
- En cas de dégradations, ils peuvent être tenus civiquement responsables et contraints de réparer les dommages matériels.
- La loi protège également les propriétaires contre les recours dilatoires des occupants.
Rôle des autorités
- La police peut intervenir immédiatement en cas de flagrant délit de violation de domicile.
- Le préfet, via la procédure administrative, joue un rôle central dans les expulsions rapides.
- En l’absence de décision administrative, l’exécution d’un jugement d’expulsion par huissier, avec le concours de la force publique, est la voie légale pour déloger les squatteurs.
En résumé, la France dispose aujourd’hui d’un cadre juridique structuré pour gérer les squats, combinant rapidité d’intervention, garanties légales et sanctions dissuasives. Que ce soit par une voie administrative accélérée ou une procédure judiciaire classique, les outils sont en place pour permettre aux propriétaires de récupérer leurs biens dans le respect de l’État de droit.
Législation anti-squat : toutes les lois en vigueur pour protéger vos biens
1. Les articles de loi applicables
Code pénal : Le squat est assimilé à une violation de domicile. L’article 226-4 du Code pénal sanctionne le fait de s’introduire ou de se maintenir dans le domicile d’autrui par manœuvre, menace, voie de fait ou contrainte. Depuis la loi du 27 juillet 2023, cette infraction est passible de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende, au lieu d’un an et 15 000 € précédemment
. La notion de « domicile » a été élargie : il s’agit de « tout local d’habitation contenant des biens meubles appartenant [à la personne], qu’elle y habite ou non et qu’il s’agisse de sa résidence principale ou non »
. Autrement dit, une résidence secondaire occupée sans droit est désormais aussi protégée que la résidence principale par l’article 226-4
. En outre, cet article réprime tant l’entrée illégale que le maintien dans les lieux (délit continu) avec les mêmes peines
.
La loi du 27 juillet 2023 (dite “loi Kasbarian-Bergé” ou « loi anti-squat ») a également introduit de nouvelles infractions pour mieux couvrir les cas de squat. L’article 315-1 du Code pénal (nouveau chapitre « De l’occupation frauduleuse d’un local… ») punit de 2 ans de prison et 30 000 € d’amende le fait de s’introduire ou de se maintenir, par voies de fait ou contrainte, dans « un local à usage d’habitation ou à usage commercial, agricole ou professionnel » sans droit ni titre
. Cette infraction vise les squatteurs qui occupent n’importe quel logement (y compris vacant) ou local professionnel, même si celui-ci ne constituait pas le domicile au sens strict de la victime
. Par ailleurs, l’article 315-2 du Code pénal punit d’une amende de 7 500 € le fait, pour un occupant sans droit ni titre, de se maintenir dans un logement en défiant une décision de justice définitive ordonnant son expulsion (plus de deux mois après un commandement de quitter les lieux signifié)
. Enfin, noter que l’article 226-4-2 du Code pénal (introduit par la loi ALUR 2014) sanctionne quant à lui le propriétaire ou tiers qui procèderait à une expulsion illégale : forcer un occupant à partir sans décision de justice régulière est puni de 3 ans de prison et 30 000 € d’amende
.
Code des procédures civiles d’exécution (CPCE) : Ce code régit la procédure d’expulsion classique. L’article L.411-1 du CPCE dispose que, sauf disposition spéciale, l’expulsion d’un immeuble ou d’un lieu habité ne peut être poursuivie qu’en vertu d’une décision de justice (ou d’un procès-verbal de conciliation exécutoire) et après signification d’un commandement de quitter les lieux
. En temps normal, une fois le jugement d’expulsion obtenu et le commandement délivré par huissier, l’article L.412-1 impose un délai de 2 mois avant de pouvoir procéder à l’évacuation forcée, sauf si le juge a accordé un délai plus court. Le CPCE prévoit aussi la trêve hivernale (article L.412-6), c’est-à-dire la suspension des expulsions du 1ᵉʳ novembre au 31 mars. Toutefois, les squatteurs ne bénéficient pas de la trêve hivernale : la loi ÉLAN 2018 a exclu les occupants sans droit ni titre de cette protection, de sorte que la procédure d’expulsion de squat peut avoir lieu même pendant l’hiver
. De même, le juge peut refuser ou réduire les délais d’exécution compte tenu de l’occupation illégale. En pratique, les squatteurs ne sauraient invoquer ni le sursis de 2 mois ni la trêve hivernale, lesquels protègent les locataires de bonne foi, pas les occupants illicites.
Lois spécifiques récentes : La loi n°2020-1525 du 7 décembre 2020 dite loi ASAP (Accélération et simplification de l’action publique) a créé une procédure administrative d’expulsion en cas de squat. Elle a modifié l’article 38 de la loi n°2007-290 du 5 mars 2007 (loi DALO) pour permettre au préfet d’intervenir sans décision de justice dans certaines conditions
. La loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 (visant à protéger les logements contre l’occupation illicite) a, quant à elle, renforcé les sanctions pénales (triplement des peines de violation de domicile
) et étendu le champ des procédures d’expulsion accélérées (voir ci-après). Ces lois, en vigueur en 2025, forment le cadre juridique actuel de la lutte contre les squats en France.
2. Démarches pour récupérer un bien occupé illégalement
a) Résidence principale squattée (ou domicile occupé) : Si votre domicile (logement où vous vivez habituellement) est squatté, la loi offre une voie accélérée. Dans les premières 48 heures, il est conseillé d’agir en flagrant délit : porter plainte immédiatement pour violation de domicile (art. 226-4) et faire constater l’intrusion par un officier de police judiciaire (OPJ)
. En effet, tant que l’infraction est flagrante (crime ou délit en cours), la police peut intervenir d’office et expulser sur-le-champ les squatteurs
. Le squat étant un délit continu, il peut être considéré comme flagrant même au-delà de 48 heures si les occupants sont toujours présents et que le propriétaire vient de découvrir les faits
. En pratique toutefois, les forces de l’ordre sont souvent réticentes à intervenir sans procédure au-delà de deux jours d’occupation, d’où l’importance de réagir vite. Il faut rassembler tout justificatif que le logement est votre domicile (pièce d’identité avec cette adresse, factures, acte de propriété, témoignages…) pour prouver votre droit au logement squatté
. Une fois la plainte déposée et le squat constaté par la police, vous pouvez enclencher la procédure administrative via le préfet.
Procédure accélérée auprès du préfet : La loi ASAP 2020 a instauré une évacuation administrative expresse pour domicile squatté. Cette procédure, prévue à l’article 38 de la loi DALO, est dérogatoire au procès classique
. Vous (ou votre représentant) adressez au préfet une demande d’expulsion forcée, à condition de fournir : 1) la copie du dépôt de plainte préalable, 2) la preuve que le logement occupé est votre domicile (au sens large, domicile principal ou non) ou celui de la personne que vous représentez, 3) un constat d’occupation illicite établi par un officier de police judiciaire
. Une fois le dossier complet, le préfet doit statuer sous 48 heures
. S’il accepte (il ne peut refuser qu’en cas de défaut de condition ou de motif impérieux d’intérêt général exceptionnel), il adresse aux squatteurs une mise en demeure de quitter les lieux – un ordre de libérer le logement – qui leur laisse un délai d’exécution d’au moins 24 heures
. Cette mise en demeure est notifiée aux occupants et affichée en mairie et sur l’immeuble
. Si les squatteurs ne partent pas volontairement dans le délai imparti, le préfet doit faire procéder sans délai à leur évacuation forcée, en requérant l’intervention de la police
. Grâce à cette voie administrative, la récupération du domicile peut ainsi être obtenue en quelques jours seulement (quelques heures pour l’instruction + 24 h de préavis). À noter que depuis 2023, cette procédure peut être engagée par toute personne dont le domicile est occupé illicitement (propriétaire, locataire légitime, etc.) ou par un tiers agissant en son nom
. Autrement dit, même un locataire évincé par des squatteurs peut saisir le préfet, pas seulement le propriétaire.
b) Bien vacant ou résidence secondaire squatté : Historiquement, les résidences secondaires ou logements inoccupés devaient faire l’objet d’une procédure judiciaire classique. Désormais, la distinction s’est atténuée, car la loi de 2023 a étendu la procédure préfectorale accélérée à tout local à usage d’habitation, même s’il n’est pas occupé en tant que domicile du propriétaire
. Concrètement, cela inclut les logements vides, maisons de vacances, biens en succession, logements nouvellement acquis ou construits non encore habités, etc.
. Si votre bien entre dans cette catégorie, vous pouvez également saisir le préfet de la même manière, mais en tant que propriétaire du local. Il faudra prouver votre droit de propriété sur le bien (acte notarié, taxe foncière) plutôt que le caractère de domicile
. La procédure est la même (plainte, constat d’occupation illégale, décision préfectorale en 48h, mise en demeure 24h) et vise désormais tous les logements squattés. En revanche, pour les lieux qui ne sont pas à usage d’habitation (par exemple un local purement commercial, un entrepôt non habitable), l’expulsion administrative sans juge reste réservée au cas où ces lieux constituent tout de même le domicile d’une personne légitime
. À défaut, il faudra recourir à la voie judiciaire (voir ci-dessous).
Procédure judiciaire (voie ordinaire) : Si la procédure préfectorale n’est pas possible (par exemple squat d’un local non habitable, ou bien refus du préfet, ou encore si vous choisissez d’emblée la voie judiciaire), il convient d’engager une action en expulsion devant le tribunal. Cette action se fait généralement devant le tribunal judiciaire du lieu de l’immeuble. Le propriétaire doit assigner en justice les occupants sans droit ni titre (les squatteurs) pour obtenir un jugement d’expulsion. On peut agir en référé (procédure d’urgence) si la situation le justifie, ce qui permet une audience rapide sous quelques semaines. Une fois l’ordonnance ou le jugement rendu ordonnant l’expulsion, un huissier de justice (commissaire de justice) signifie aux squatteurs un commandement de quitter les lieux. En principe, un délai légal de 2 mois s’applique avant l’exécution forcée (pour laisser le temps de partir), mais dans le cas d’un squat, le juge peut réduire ou supprimer ce délai compte tenu de l’absence de tout titre d’occupation. Souvent, les décisions d’expulsion de squatteurs sont assorties de l’exécution provisoire, ce qui permet de faire intervenir l’huissier et la police sans attendre d’éventuels recours. Si les occupants refusent toujours de partir, l’huissier peut requérir le concours de la force publique (police ou gendarmerie) pour procéder à l’évacuation forcée du logement, en vertu de la décision de justice (c’est l’application classique de l’article L.411-1 du CPCE)
. Cette voie judiciaire, bien qu’infaillible juridiquement, prend généralement plus de temps que la procédure préfectorale : il faut compter quelques semaines à quelques mois pour obtenir une audience et un jugement, puis encore des délais d’exécution. Pendant ce temps, malheureusement, le propriétaire reste privé de son bien. C’est pourquoi la loi encourage à privilégier la voie accélérée du préfet pour les squats, quand elle s’applique
.
3. Délais et recours possibles
Délai d’intervention du préfet : La procédure administrative est très rapide. Dès réception d’une demande complète, le préfet a 48 heures pour statuer
. S’il décide d’agir, il adresse immédiatement la mise en demeure aux squatteurs, en leur accordant un délai qui ne peut être inférieur à 24 heures pour quitter les lieux d’eux-mêmes
. En pratique, le préfet fixe généralement un délai court (24 ou 48h). Une fois ce délai expiré, l’évacuation forcée est ordonnée sans autre formalité. La loi ne suspend pas cette procédure durant la trêve hivernale : même en plein hiver, le préfet doit intervenir si les conditions sont réunies
. Ainsi, pour un squat avéré dans un domicile ou un local d’habitation, l’ensemble de l’opération (instruction + mise en demeure + expulsion) peut être mené en quelques jours, quelle que soit la période de l’année. À noter que si le propriétaire n’a pas accès à ses documents pour prouver son droit (papiers restés à l’intérieur du logement squatté), la loi de 2023 permet au préfet de consulter l’administration fiscale pour vérifier la propriété, ce qui peut ajouter jusqu’à 72h d’instruction supplémentaire
. Le délai de 48h commence alors à courir après réception des informations fiscales
.
Délais d’une procédure judiciaire : À l’inverse, l’itinéraire judiciaire prend souvent plus de temps. Même en référé d’urgence, il faut le temps de convoquer les squatteurs en justice (délai de quelques jours à plusieurs semaines). Si le juge rend une ordonnance d’expulsion immédiate, le propriétaire peut ensuite faire intervenir un huissier sans attendre (exécution provisoire). Toutefois, si les squatteurs résistent, il faut coordonner l’intervention de la force publique, ce qui peut prendre encore plusieurs jours ou semaines selon la réactivité de la préfecture (qui doit délivrer le concours de la police). En cas de procédure au fond (assignation classique), les délais s’allongent : l’audience peut intervenir après plusieurs mois, et une décision définitive encore plus tard si les occupants utilisent tous les recours. En moyenne, une expulsion judiciaire de squat peut prendre plusieurs mois, surtout si les squatteurs font traîner les choses. Par exemple, un cas médiatisé a duré 18 mois faute de procédure rapide
. C’est pourquoi la législation récente a tout fait pour éviter d’en arriver à ces délais en offrant des solutions plus promptes.
Recours des squatteurs et moyens de les contrer : Un squatteur expulsé par voie administrative (décision du préfet) dispose de peu de recours juridiques avant l’exécution – l’objectif de la loi étant d’éviter les manoeuvres dilatoires. En théorie, les occupants pourraient déposer un recours devant le tribunal administratif (par exemple un référé-liberté ou référé-suspension) pour contester la légalité de la décision du préfet, mais compte tenu des délais très courts (48h), il leur est difficile d’obtenir un sursis à temps. D’autant que le préfet n’agit que si les conditions légales sont remplies, ce qui limite les arguments des squatteurs. Dans la procédure judiciaire, les squatteurs peuvent faire appel du jugement d’expulsion, ce qui en principe suspend l’exécution sauf si l’exécution provisoire a été prononcée. Pour prévenir ce retard, les propriétaires veillent à demander l’exécution provisoire dans l’assignation, et les juges l’accordent quasi systématiquement en matière de squat illégal. Les squatteurs peuvent également solliciter des délais de grâce (art. L.412-3 CPCE) en invoquant leur situation familiale ou de santé. Le juge des expulsions a la faculté d’accorder, même d’office, un sursis pouvant aller de 3 mois à 3 ans maximum dans les cas ordinaires. Cependant, dans un squat avéré (occupation sans aucun droit), il est rare qu’un long délai soit octroyé – au mieux quelques semaines – car la loi précise que ces délais peuvent être refusés lorsque l’occupant est entré illicitement dans les lieux. De plus, la trêve hivernale étant écartée pour les squatteurs, ils ne peuvent pas légalement exiger de rester jusqu’au printemps suivant
.
Certains squatteurs tentent des stratagèmes pour compliquer l’expulsion. Par exemple, dès qu’ils s’installent, ils peuvent changer les serrures, effacer les traces d’effraction et même fabriquer un faux bail qu’ils exhibent aux autorités
. Leur but est de se faire passer pour des locataires afin de semer le doute et de judiciariser l’affaire (poussant le propriétaire à prouver la fraude devant un tribunal). Pour contrer cela, il est essentiel de réagir vite et de déposer plainte avant que les squatteurs ne puissent crédibiliser une fausse histoire. La police, alertée rapidement, pourra constater l’effraction et l’absence de titre. En cas de faux bail, le propriétaire doit démontrer qu’il n’a jamais donné les clés ni signé de contrat (par exemple en produisant ses propres documents, en montrant l’incohérence du prétendu bail, etc.). La nouvelle loi de 2023 crée d’ailleurs une infraction spécifique contre les individus qui organisent ou profitent de tels montages frauduleux (location illicite du bien d’autrui)
. Enfin, si un squatteur refuse de partir malgré une décision de justice définitive, il se place lui-même dans l’illégalité aggravée : comme indiqué, l’article 315-2 du Code pénal le rend passible d’une amende de 7 500 €
en plus des frais d’astreinte éventuels. Autant de leviers qui incitent les occupants illégaux à ne pas abuser des recours.
4. Sanctions encourues par les squatteurs
Un occupant sans droit ni titre encourt principalement des sanctions pénales pour le squat lui-même. La violation de domicile (art. 226-4 CP) est un délit désormais puni de 3 ans d’emprisonnement et 45 000 € d’amende
. Ces peines triplées par la loi de 2023 traduisent la sévérité accrue envers les squatteurs. Même si, en pratique, les peines maximales sont rarement prononcées, un squatteur interpellé risque une garde à vue et des poursuites pénales. Par ailleurs, depuis 2023, le fait de squatter n’importe quel local d’habitation (même un logement vacant) constitue également un délit d’occupation frauduleuse (art. 315-1 CP), passible de 2 ans de prison et 30 000 € d’amende
. Ainsi, squatter un logement vide n’est plus un simple litige civil : c’est formellement un délit. À noter que ces infractions visent l’entrée et le maintien illégal ; il n’y a pas besoin qu’une dégradation soit commise pour que le délit existe. De plus, en cas d’effraction (porte fracturée, vitre brisée), d’autres infractions peuvent s’ajouter, comme la dégradation de bien privé ou la violation de domicile avec effraction, circonstance qui aggrave la peine possible. La loi incrimine également la propagande en faveur du squat : par exemple, publier un guide expliquant comment occuper un logement illégalement est puni d’une amende (3 750 € d’amende, art. 226-4-2-1 CP)
.
Sur le plan civil, les squatteurs engagent leur responsabilité pour les dégâts matériels qu’ils causent. S’ils détériorent le logement (casse, dégradations, insalubrité), le propriétaire peut demander des dommages-intérêts en justice pour remise en état. Les squatteurs devront indemniser les frais de réparation, le préjudice de jouissance (loyers perdus, etc.), éventuellement au besoin par voie de saisie sur leurs biens si un tribunal les condamne civilement. En pratique, il est souvent difficile de recouvrer ces sommes si les squatteurs sont insolvables, mais la condamnation peut dissuader ou marquer leurs antécédents. La loi de 2023 avait envisagé de décharger les propriétaires de toute responsabilité envers les tiers durant la période du squat, en tenant uniquement les squatteurs responsables des dommages survenus à des tiers du fait d’un défaut d’entretien
. Toutefois, le Conseil constitutionnel a censuré une partie de ces dispositions au nom du droit des victimes à être indemnisées correctement
. Il n’en reste pas moins que, par principe, un occupant illégal assume les risques et dommages liés à l’occupation : s’il provoque un incendie, une inondation ou tout sinistre, il peut être poursuivi pour les dégâts causés. De même, utiliser indûment l’électricité, l’eau ou le gaz du logement peut constituer une fraude ou un vol de fluides à son encontre. En résumé, squatter expose non seulement à être expulsé, mais aussi à des poursuites judiciaires multiples et à des obligations de réparer les torts causés.
5. Rôle des autorités et de la police dans l’expulsion
Intervention immédiate de la police : Les forces de l’ordre peuvent intervenir sans attendre une décision judiciaire dans des cas bien précis. Cela se produit essentiellement lorsqu’il y a flagrant délit de violation de domicile – par exemple, lorsque le propriétaire revient chez lui et découvre des intrus le jour même. Dans cette situation, une fois la plainte déposée et l’infraction caractérisée, la police peut procéder à l’évacuation immédiate des squatteurs
. L’article 53 du Code de procédure pénale permet en effet aux officiers de police judiciaire d’agir d’office sur un crime ou délit en cours
. Ainsi, contrairement à une idée reçue, il n’y a pas de délai strict de 48 heures inscrit dans la loi pour agir : tant que le squat est constaté comme récent et qu’aucun titre n’est présenté, les autorités peuvent considérer la violation de domicile comme continue et flagrante
. En pratique néanmoins, passé un certain délai d’occupation (quelques jours), les policiers exigent souvent une validation (par le préfet ou un juge) avant de déloger les occupants, surtout si ces derniers prétendent avoir un droit.
Procédure administrative (autorité préfectorale) : En l’absence de réaction policière spontanée ou si le squat n’a pas pu être traité en flagrance, c’est l’autorité préfectorale qui prend le relais via la procédure administrative. Le préfet, représentant de l’État, joue un rôle central en examinant le dossier du propriétaire victime et en ordonnant l’expulsion s’il y a lieu
. Une fois la mise en demeure délivrée, la loi confère au préfet le pouvoir de requérir la force publique pour exécuter l’évacuation, sans avoir besoin d’un juge. La police ou gendarmerie interviendra alors sur instruction du préfet, conformément à l’article 38 de la loi DALO modifié
. Il est important de souligner que le préfet doit mettre en œuvre l’évacuation dès que les conditions légales sont remplies : il s’agit d’une compétence liée, non discrétionnaire
. Il ne peut refuser d’agir qu’en cas de motif impérieux d’intérêt général dûment justifié (par exemple, un risque grave pour la santé ou la sécurité si l’expulsion était menée immédiatement). Dans la pratique actuelle, les préfets suivent donc la procédure et font évacuer les squats administrativement dans les délais impartis, y compris pendant la période de trêve hivernale
. Les forces de l’ordre sont tenues de prêter main-forte à cette exécution administrative.
Intervention sur décision de justice : Si c’est la voie judiciaire qui est empruntée (ou si l’expulsion administrative a échoué), la police n’interviendra qu’une fois muni d’un titre exécutoire émanant du tribunal. L’huissier de justice, porteur du jugement d’expulsion, peut requérir le concours de la force publique. La préfecture délivre alors un ordre aux policiers pour procéder à l’évacuation des lieux, en exécution de la décision de justice. Ici, le rôle de la police est exécutif : elle n’évalue pas le fond du droit, mais prête son appui pour faire respecter le jugement. Notons qu’en droit français, la force publique doit prêter son concours à une expulsion judiciaire dès lors que toutes les formalités sont accomplies, sauf circonstances exceptionnelles (troubles à l’ordre public trop importants, etc.). Si l’État refusait indûment d’intervenir, le propriétaire pourrait engager sa responsabilité pour obtenir une indemnisation (on parle de la “responsabilité pour défaut de concours de la force publique”).
Cas nécessitant une décision de justice préalable : La police ne peut pas évincer des occupants sans cadre légal. Si les personnes sur place prétendent avoir un bail, un droit quelconque, ou si le caractère illicite de leur occupation est incertain, les forces de l’ordre ne prendront pas l’initiative de trancher le litige. Elles inviteront le propriétaire à saisir le tribunal. De même, si un squat concerne un lieu non couvert par la procédure administrative (par exemple un terrain nu, un local non habitable), il faudra une décision judiciaire pour procéder à l’expulsion. En somme, dès qu’il y a un doute sur la légitimité de l’occupation, une décision du juge est obligatoire avant toute intervention musclée. C’est une garantie des droits : éviter les expulsions arbitraires de personnes qui pourraient finalement avoir un titre (par exemple un ancien locataire dont le bailleur contesterait abusivement le droit). Néanmoins, une fois le jugement obtenu, ni la préfecture ni la police ne peuvent s’y soustraire : ils devront exécuter l’ordre d’expulsion, même contre la volonté des squatteurs.
En résumé, les autorités ont désormais les outils juridiques pour intervenir très rapidement contre les squats : soit immédiatement via la police en cas de flagrant délit de violation de domicile, soit en quelques jours via le préfet grâce à la procédure administrative, soit à plus long terme via un jugement d’expulsion classique. Le tout est encadré par la loi afin de respecter le droit de chacun : le droit de propriété et au logement du propriétaire lésé, et les droits de la défense pour les occupants (qui peuvent contester devant un juge, mais sans abus de droit). En 2025, le cadre légal français assure donc une protection renforcée contre les squatteurs, avec des procédures adaptées à chaque situation pour expulser efficacement les occupants illégaux tout en restant dans le respect de l’État de droit.